Entretien avec le Général de Castries sur l'opération de Diên Biên Phu (Điện Biên Phủ)-1

Radio broadcast about the military operation of Diên Biên Phu (Điện Biên Phủ) in 1954 (Indochine war). Side 1
Je ne vous présenterai évidemment pas le général de Castries, je voudrais simplement, avant de commencer cet entretien qu'il a bien voulu m'accorder, je voudrais simplement évoquer un souvenir, une silhouette, la silhouette d'un chef d'escadron de spahis au matin du 4 avril 1945 : Planté en plein soleil, son calot rouge en tête au milieu de l'Adolf Hitler Platz de Karlsruhe et regardant ses blindés, regardant ses chars tournoyer dans la lumière autour de l'esplanade, ses chars qui venaient de donner à la première armée française sa première grande ville ennemie conquise au seuil de sa campagne Rhin et Danube. Ce chef d'escadron, vous l'avez deviné, était le commandant de Castries. Je l'apercevais alors pour la première fois. Mon général, je ne vais évidemment pas vous demander de faire ici la genèse de l'opération Diên Biên Phu, d'exposer les raisons stratégiques de ce qu'a été la création de cette place-forte, ce qui nous entraînerait beaucoup trop loin, je voudrais vous demander au contraire de commencer assez illogiquement peut-être par la fin, c'est-à-dire de nous dire : Comment est tombé Diên Biên Phu. - Nous avons compris, nous avons compris que Diên Biên Phu ne pourrait plus tenir à partir du moment où le centre de résistance Éliane 2 est tombé dans la nuit du 6 au 7 mai. Ce centre de résistance qui avait été attaqué le 30 mars avec autant de violence que Dominique 1, Dominique 2 et Éliane 1 avait tenu grâce à l’héroïsme des gens qui le tenaient et à celui des différentes unités qui avaient contre-attaqué sans cesse pendant deux jours et trois nuits pour maintenir la possession de ce point d'appui essentiel pour la défense de Diên Biên Phu. Au matin du 7, le point d'appui Éliane 2 était tombé. Il était tenu… il avait été tenu pendant la dernière nuit par des troupes fraîches parachutées l'avant-veille du 1er BPC qui se sont battues héroïquement sous le commandement du capitaine Pouget. Submergé par le nombre, vers 2 heures du matin, je n'avais plus aucune communication avec le capitaine Pouget. Au lever du jour, le colonel Langlais, sans attendre même que je lui en donne l'ordre, avait préparé une contre-attaque et avait réuni pour cela les quelques débris qui nous restaient encore, c'est-à-dire environ trois compagnies de quatre-vingts hommes chacune appuyées par les quelques coups de canon qui nous restaient. Au moment où cette contre-attaque a voulu déboucher, l'ennemi a attaqué en force le point d'appui Éliane 4 sur lequel s'appuyait cette contre-attaque. Il l'a attaqué avec un tel effectif que, en une demi-heure, il a été complètement submergé et que la contre-attaque sur Éliane 2 était devenue sans objet. J'ai compris que nous étions à quelques minutes de la fin quand j'ai vu revenir, passer devant mon PC, tous les braves gens qui depuis cinquante-six jours combattaient sans arrêt et qui étaient complètement épuisés. (Transcription: Henri Chamoux) View more +View less -
Edited Title
en Discussion with General de Castries about Diên Biên Phu (Điện Biên Phủ) operation [6-7 mai 1954] -1
Archivist's Original Title
fr Entretien avec le Général de Castries sur l'opération de Diên Biên Phu (Điện Biên Phủ)-1
Original description
Radio broadcast about the military operation of Diên Biên Phu (Điện Biên Phủ) in 1954 (Indochine war). Side 1
Transcription
fr Je ne vous présenterai évidemment pas le général de Castries, je voudrais simplement, avant de commencer cet entretien qu'il a bien voulu m'accorder, je voudrais simplement évoquer un souvenir, une silhouette, la silhouette d'un chef d'escadron de spahis au matin du 4 avril 1945 : Planté en plein soleil, son calot rouge en tête au milieu de l'Adolf Hitler Platz de Karlsruhe et regardant ses blindés, regardant ses chars tournoyer dans la lumière autour de l'esplanade, ses chars qui venaient de donner à la première armée française sa première grande ville ennemie conquise au seuil de sa campagne Rhin et Danube. Ce chef d'escadron, vous l'avez deviné, était le commandant de Castries. Je l'apercevais alors pour la première fois.

Mon général, je ne vais évidemment pas vous demander de faire ici la genèse de l'opération Diên Biên Phu, d'exposer les raisons stratégiques de ce qu'a été la création de cette place-forte, ce qui nous entraînerait beaucoup trop loin, je voudrais vous demander au contraire de commencer assez illogiquement peut-être par la fin, c'est-à-dire de nous dire : Comment est tombé Diên Biên Phu.
- Nous avons compris, nous avons compris que Diên Biên Phu ne pourrait plus tenir à partir du moment où le centre de résistance Éliane 2 est tombé dans la nuit du 6 au 7 mai. Ce centre de résistance qui avait été attaqué le 30 mars avec autant de violence que Dominique 1, Dominique 2 et Éliane 1 avait tenu grâce à l’héroïsme des gens qui le tenaient et à celui des différentes unités qui avaient contre-attaqué sans cesse pendant deux jours et trois nuits pour maintenir la possession de ce point d'appui essentiel pour la défense de Diên Biên Phu. Au matin du 7, le point d'appui Éliane 2 était tombé. Il était tenu… il avait été tenu pendant la dernière nuit par des troupes fraîches parachutées l'avant-veille du 1er BPC qui se sont battues héroïquement sous le commandement du capitaine Pouget. Submergé par le nombre, vers 2 heures du matin, je n'avais plus aucune communication avec le capitaine Pouget. Au lever du jour, le colonel Langlais, sans attendre même que je lui en donne l'ordre, avait préparé une contre-attaque et avait réuni pour cela les quelques débris qui nous restaient encore, c'est-à-dire environ trois compagnies de quatre-vingts hommes chacune appuyées par les quelques coups de canon qui nous restaient. Au moment où cette contre-attaque a voulu déboucher, l'ennemi a attaqué en force le point d'appui Éliane 4 sur lequel s'appuyait cette contre-attaque. Il l'a attaqué avec un tel effectif que, en une demi-heure, il a été complètement submergé et que la contre-attaque sur Éliane 2 était devenue sans objet. J'ai compris que nous étions à quelques minutes de la fin quand j'ai vu revenir, passer devant mon PC, tous les braves gens qui depuis cinquante-six jours combattaient sans arrêt et qui étaient complètement épuisés. (Transcription: Henri Chamoux)
Time duration
00:03:28
Recording date of the original material
1954
Acquisition Date
2004
Broadcast Date
1954
Population
Viet
Place of the cultural origin
Country Name
Recording place
Resource Language
en French
Performer/Speaker
La Croix de Castries, Christian de
Comment
fr Coll. José Sourillan. Guerre d'Indochine, 1946-1954, France, Enregistrement sur disque Pyral : Jean-Claude Hénin (JCH)
Tags, Keywords
War; politic; military people
Archivist Category
en Spoken voice : discussion
Recording context
en Radio Programme
Instrument, Original Archivist Data
Male spoken voices
Collector
Name of original Collection
en South East Asia recordings, Phonobase collection (78 RPM)
History of ownership
en Collected and digitized by Henri Chamoux (Phonobase) in september 2004
Holding Institution of Original Materials
Accessing Institutions
Copyright Information
en Public Domain
Physical format
en 78rpm, 30cm
Preservation State of Physical Object
Excellent
Original item number
9479
SEAH Identifier
SEAH_Phonobase_9479
Broadcast Point of Origin